2021

Octobre

14

Tintin, la Lune, la musique et l’art de la bande dessinée

Le samedi 16 octobre à 15 heures, notre ami Dominique Maricq donnera une conférence intitulée Un Belge sur la Lune à la Gare numérique de Jeumont, un lieu de créativité autour des nouvelles pratiques culturelles en lien avec les technologies numériques. « Bien avant la conquête de la Lune par les Américains (1969), un petit Belge avait posé le pied sur le satellite naturel de la Terre », rappelle Dominique Maricq, qui reviendra sur cette aventure exceptionnelle, 16 ans avant Apollo 11. Cette première du genre illustre la conquête spatiale avec réalisme, où Hergé se pose en véritable vulgarisateur scientifique.

Le mercredi 20 octobre à 17 heures, dans le cadre du Festival Pages d’Automne au Rocher de Palmer, une salle de spectacle à Cenon (région bordelaise), Alexis Descharmes présentera une rencontre autour de Tintin et la musique. Selon le programme, au-delà de la Castafiore, « les albums d’Hergé dissimulent une foule d’autres références musicales, de l’opéra à l’opérette, en passant par la chanson, les chants de marins ou les musiques traditionnelles des pays les plus exotiques. »

Le lendemain, jeudi 21 octobre à 19 heures, Benoît Peeters se penchera sur Hergé et l’art de la bande dessinée lors d’une soirée proposée par l’Alliance française de Paris. La conférence, sur place ou en ligne et suivie d’un temps d’échange avec le public, reviendra en particulier sur la traversée du XXe siècle par le petit reporter : « De l’Amérique à l’Asie en passant par la lune, les aventures du jeune héros intrépide ne cessent de séduire enfants comme adultes, génération après génération. Bien qu’issu d’un milieu conservateur et ayant peu voyagé, Hergé est parvenu à créer un personnage aux valeurs universelles dont les aventures restent intemporelles. »

Les ADMH mettent la clef sous la porte

En 2019, à l'occasion des 10 ans du musée Hergé, les Amis du musée Hergé (ADMH) publiaient un recueil d’articles parus depuis 2011 dans leur revue. L’année 2020 devait être celle du « renouveau » et du « changement ». La revue fut remplacée par des nouvelles « diffusées ponctuellement sous forme de communiqués dynamiques » et on nous annonçait monts et merveilles… Mais depuis février 2020, silence de mort… Un message laconique envoyé aux membres le 7 octobre les informe de la fin de cette association : « Après 10 ans d’existence, nous devons malheureusement mettre un terme aux ADMH et ce, à compter de ce 15 octobre 2021. » « L’équipe des ADMH » remercie « chaleureusement » les destinataires de « [leur] soutien et de [leur] fidélité tout au long de ces années » et espère les « revoir bientôt au musée Hergé », dont on pourra toujours suivre l’actualité sur le site et sur les réseaux sociaux (Facebook et Instagram). Les ADMH, qui se voyaient à l’origine fédérateurs – voire plus – du monde associatif tintinophile, n’auront donc pas réussi leur pari. Rappelons qu’au début un rapprochement avait été envisagé entre Les ADH et la nouvelle association, cavalièrement baptisée ADMH par ses promoteurs, mais que la société Moulinsart avait prématurément mis un terme aux négociations en cours, sans donner la moindre explication. L’arrêt des ADMH ressemble à un non-évènement. Mais, après le départ de la regrettée directrice du musée, Anne Eyberg, et les réductions d’horaires comme de personnel, la nouvelle a de quoi inquiéter les fidèles. Le rassemblement annuel du mois de mai, belle occasion de se retrouver à Louvain-la-Neuve entre tintinophiles, leur manquera…

À suivre chez Moulinsart…

Un spécialiste de vidéo, Mr Paradise, a mis en ligne sur sa chaîne YouTube une présentation de Tintin l'intégrale de l'animation, une nouvelle magnifique édition collector produite par Citel Vidéo. On peut se procurer ce beau coffret en édition limitée grand format sur certains sites de ventes. Il réunit sur 10 DVD l'intégralité des 21 aventures de la série d'animation, plus les 3 longs métrages L'affaire Tournesol, Le temple du soleil et Le lac aux requins, et une figurine de la fusée lunaire en PVC de 17 cm de hauteur. Par ailleurs, Hachette et Moulinsart viennent de tester dans certains départements français (c’est une pratique habituelle avant un lancement national) une nouvelle collection intitulée « Construisez la Jeep d'Objectif Lune ». Il faudra acheter les 120 numéros de cette nouvelle collection pour construire la maquette à l’échelle 1/8 avec ses quatre personnages. Le premier numéro est vendu au prix de 1 euro. Le deuxième numéro au prix de 5,99 euros. Les suivants à 11,99 euros, soit un total de… 1421,81 euros ! Chaque pièce sera accompagnée d’un « livret exclusif » et d’un guide de montage. Plusieurs cadeaux sont offerts au début de la collection (un mug, le classeur pour les livrets, une mini fusée…).

La famille Casterman se rebiffe

Dernier rebondissement dans l’affaire du Lotus bleu (voir notre lettre de janvier dernier), La Libre a publié le 8 octobre une carte blanche de Martine, Chantal et Jean-Louis Casterman pour défendre mordicus la thèse du cadeau d’Hergé à leur père, Jean-Paul Casterman, fils de Louis Casterman, l’éditeur historique du dessinateur bruxellois … « Non, la famille Casterman n'a pas volé la couverture du Lotus Bleu de Tintin. Voici la vérité historique et matérielle », annonce, un peu pompeusement, la famille Casterman, prenant le contrepied de l’avis éclairé de certains spécialistes… « Souhaitant l’apaisement des esprits, écrivent-ils, nous entendons rétablir ici la vérité. Contrairement à ce qu'a prétendu Nick Rodwell, patron de la société Moulinsart, en qualifiant la vente de ce dessin par notre famille de "vol", ce dernier a été offert par Hergé à notre père, lorsqu'il était petit. » Le sujet est sensible, soulignons cependant que la famille n’apporte aucune preuve matérielle et occulte totalement les trous d’agrafe et le format du dessin plié aux dimensions exactes de l’enveloppe, preuve d’un envoi postal par Hergé à son éditeur…

Revues et livres en stock

L’avalanche continue, les bibliothèques débordent ! Le « mystérieux hors-série » que nous annoncions dans notre lettre de mai sortira le 13 octobre, édité par Geo et Moulinsart dans la collection Tintin c’est l’aventure. Alors que l’ouvrage sur Oliveira da Figueira d’Albert Algoud est annoncé pour le 10 novembre (lire ci-dessous), Moulinsart va publier un catalogue de l’exposition Hergé à Lisbonne (voir notre lettre de mars dernier), dans lequel sera encarté un petit livre titré Hergé em Portugal coordonné par Antonio José Cabral, par ailleurs membre des ADH. En Espagne, Benoît Peeters propose une traduction de son petit livre Dans les coulisses des aventures de Tintin sous le titre Entre los bastidores de Las aventuras de Tintin. L’éditeur Liber annonce pour le 4 novembre Tintin au pays du mal. La face cachée d’une étoile mystérieuse de Jean-Philippe Costes, avec un taijitu en couverture. Gordon Zola continue le travail de réécriture de certains volumes de la série parodique « Saint-Tin et son ami Lou ». Il sortira un nouveau titre le 3 novembre : Saint-Tin et l’amer hic… Chez Sépia, au programme de la collection « Zoom sur Hergé », notons un ouvrage qui fait saliver : Les Secrets d’Hergé dessinateur ou L’Art de composer les images. Bruno Cassiers y analyse de quelle manière l’auteur des Aventures de Tintin a maîtrisé l’art, discret mais essentiel, de la composition pour positionner constamment le lecteur au cœur de l’action… Sortie prévue en février 2022. Le prochain livre du tintinophile Bob Garcia, Tintin et l'Histoire, est également annoncé aux éditions Desclée de Brouwer en février prochain. Signalons enfin l’album de bande dessinée E.P. Jacobs, le rêveur d'apocalypses (scénario François Rivière, dessins Philippe Wurm) qui sortira le 24 novembre aux éditions Glénat, avec un chapitre sur Hergé.

Le Sr Oliveira da Figueira d’Albert Algoud

Le prochain livre tintinophile d’Albert Algoud sortira chez Chandeigne le 10 novembre sous le titre Le Sr Oliveira da Figueira… & les aventures de Hergé et Tim-Tim au Portugal, illustré par Philippe Dumas (et non Patrick comme indiqué par erreur dans notre lettre de juillet). Les Aventures de Tintin furent publiées au Portugal en couleurs dès 1936 dans le magazine O Papagaio, rappelle le résumé de l’éditeur, « mais avec des teintes criardes, un découpage fantaisiste, des textes coupés ou adaptés et bien d’autres curiosités qui désespérèrent parfois Hergé. » Albert Algoud établit ici la biographie du senhor Oliveira da Figueira, grâce à qui « le Portugal est très présent dans Les Aventures de Tintin ». Dans la version publiée par le magazine portugais, « Tintin – ou plutôt Tim-Tim – y est un reporter portugais habitant Lisbonne ; Milou, une chienne appelée Rom-Rom ; le Dr Müller devient le Dr Silva et Oliveira da Figueira momentanément espagnol. Après la guerre, tous les personnages, même très secondaires, seront naturalisés portugais. » Et de conclure, « Fourmillant d’anecdotes, d’exégèses humoristiques et de pistes nouvelles, cet ouvrage […] explore les aspects parfois très saugrenus de l’aventure tintinesque au Portugal, illustrés par l’inspiration facétieuse de Philippe Dumas »..

Objectif Hergé de Michel Porret

Attardons-nous également sur le petit livre de Michel Porret paru aux Presses de l'Université de Montréal : Objectif Hergé. « Tout commence en 1930 dans la violence de la révolution bolchevique au pays des Soviets. Tout se boucle en 1986 dans l’univers huppé de l’art contemporain. Entre la lutte des classes et la polémique esthétique, la saga de Tintin est une quête du bien dans la violence de l’histoire du XXe siècle. De la Terre à la Lune, entre mer, désert et cimes, flanqué du socratique Milou puis de l’ivrogne au grand cœur Haddock, le petit Don Quichotte qui aime les livres affronte tous les bandits du monde »… Rédigé pour le fils de l’auteur, Arsène, cet ouvrage se veut un « essai ludique » et dresse un formidable tableau empreint de culture et d’humanisme de la saga tintinesque. « (…) la saga de Tintin est une aventure esthétique et humaine », souligne le résumé de l’éditeur. Le livre de Michel Porret « y revient au prisme de son imaginaire social qui en fait une œuvre universelle jusque dans la relation parodique ». Pour la petite histoire, Objectif Hergé aurait dû être titré d’une phrase tirée des Cigares du pharaon, « Tintin, voilà des années que je lis tes aventures », et être illustré par quelques images d’Hergé. Malheureusement, les négociations avec Moulinsart ont tourné court ! Profitons-en pour signaler l’entretien accordé par Michel Porret à Radio-Canada sous le titre « Tintin replacé dans l’histoire ». L’historien, spécialiste des Lumières, de l’utopie, de justice pénale et de médecine légale (et de bande dessinée !), revient sur l’impensable destruction de certains livres, dont des albums de Tintin, par un conseil scolaire de l'Ontario et évoque son nouveau livre.